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Depuis quand je n'ai pas abandonné ?

Depuis quand je n'ai pas abandonné ?

Il y quelques jours, je me suis réveillé avec un mal de crâne pas possible. Le genre de mal de tête qui te cloue au lit. La lumière artificielle qui plombe. Les petits bruits du quotidien qui tambourinent dans la tête. Et cette fatigue générale du corps et de l'esprit.
Dans ces moments là, on pense toujours aux maux classiques : sinusite, céphalée, covid ?
Alors dans cette recherche du pourquoi, je suis allé chez le médecin.
Test Covid négatif. Et pas assez de symptômes pour établir un diagnostic.
"80% de chance que cela va passer"
Pas le choix que d'attendre. Oui mais j'ai une vie de famille à gérer, un travail à assurer, des projets qui doivent avancer.

"Fait chier, comment vais-je faire ?"

Je suis monté sur mon vélo pour rentrer chez moi, et au rythme des coups de pédales, des pensées fugaces me traversaient.
Et c'est à ce moment là que j'ai compris.
Mon corps disait stop. Mon système nerveux clignotait rouge. Je n'avais qu'une seule option : arrêter.
Pas de médecin pour me fixer. Pas de diagnostic pour justifier mon état et mon besoin de repos.

Alors que le mental oeuvre sans arrêt pour nous trouver des solutions, ce dernier a la fâcheuse tendance de nous parler sans cesse.
Imaginez que vous êtes dans une pièce avec cet ami "mental" qui vous parle sans jamais s'arrêter. Combien de temps pensez vous pouvoir tenir ?

Mais fort heureusement, parfois, cet ami est aussi là pour nous protéger.
Avec intuition et discernement, nous pouvons trouver un message plus juste.
Cette fois ci, pour moi, cette voix intérieure me disait : ça suffit.

Et pour la première fois, j'ai écouté.
J'ai dit non aux to do list. J'ai reporté la rédaction de mes articles. Plus de breathwork ni de méditation. Je n'étais plus dans le faire.

Le plus drôle dans tout ça, c'est que je finalisais en même temps mon article sur la dysrégulation du système nerveux.

Vous voyez le lien ?

Quand j'y pense, ma vie me propose souvent le même scénario. Lorsque j'étudie, apprends ou transmets un savoir, dans ma vie personnelle et professionnelle, je fais tout l'inverse.

Et si finalement, je n'étais pas moi même dans cette dysrégulation du système nerveux ?

Paradoxalement, j'avais tout ce qu'il faut : une stabilité financière retrouvé, une pratique de kiné qui reprenait du sens, des ateliers de breathwork qui se remplissaient, une confiance galvanisée par le soutien de mes proches, des rencontres hors du commun qui m'enrichissaient. J'étais en pleine ascension.
Et pourtant, c'était Las Vegas dans mon système nerveux, tous les voyants étaient éclairés.
Mon corps hurlait ce que mon ego refusait d'entendre : Tu vas trop vite.

A la suite de ces quelques jours, des vacances au vert étaient prévues.

Habituellement, je n'arrive pas à déconnecter des projets. J'embarque toujours de quoi travailler, mon micro pour le podcast et créer mes respirations conscientes guidées.
Mais cette fois ci, par le plus grand des hasards, j'ai oublié tout mon matériel au cabinet.

Cela pourrait paraître dingue mais il m'a fallu énormément de force et de courage pour accepter de me dire : "Tant pis, je vais déconnecter".

J'ai toujours grandi dans l'action. L'impression parentale me poussant à toujours avancer, à monter des projets, avec cette étiquette d'élève modèle, ambitieux et destiné à la réussite. Le retard, l'échec n'était pas une possibilité.

Depuis quand je n'ai pas abandonné ?

Deux ans, cela faisait maintenant presque 2 ans que je n'avais pas autorisé cette déconnexion profonde.

Pas de réseaux sociaux. Pas de contenu à produire. Pas de feeds instagram à checker. Pas d'appels téléphoniques à gérer.

Cette fois ci, j'allais être plutôt que de faire.
Être pleinement présent avec mes proches, en contact avec la nature environnante.
Dans ces moments là, je me dis toujours que l'univers nous offre toujours un sanctuaire dans lequel nous pouvons nous ressourcer.
Pour certains c'est l'océan, pour moi, c'est la nature verte.
Le bruit du crissement des feuilles sous les pieds.
L'odeur de l'humidité naturelle du bois, de sa sève.
L'air froid réchauffant le coeur.

Une balade en forêt n'est pas vide de sens pour moi. Elle me nourrit, tant sur le plan physique que sur le plan spirituel.
Dans cet écrin, je peux y respirer une sérénité inégalée. Je vis un amour inconditionnel pour ce qui se présente à moi.

La Nature ouvre cet espace dans lequel je peux vivre l'instant présent. Pas de jugement. Pas de qualification de bien ou mal.
Je suis juste là.

J'ai senti qu'il me fallait retrouver ce milieu naturel, un sanctuaire bien réel, pour ressentir le vivant. Me sentir vivant.

Et c'est là, dans cette forêt d'automne, en respirant cet air frais, que je comprenais le sens de ce que j'écrivais sur le système nerveux.
Cette fois ci, ce n'était pas une théorie, c'était une incarnation : le silence du corps qui se sent enfin à l'abri.
Pas de menace perçue, pas de vigilance chronique, juste un retour à l'équilibre, un lâcher prise profond.
La nature ne crée pas cette profonde quiétude, elle le révèle.
Il suffit de lâcher.

Et voilà le paradoxe : pendant tous ces mois, j'ai étudié la régulation du système nerveux comme une théorie.
J'ai pu voir de tout, de l'appropriation par l'industrie wellness jusqu'aux hypothèses de la science. Et c'est en m'arrêtant que j'ai enfin compris.

Notre système nerveux cherche toujours à nous protéger. À nous ramener à l'état d'équilibre. Il est à l'origine de cette fabuleuse intelligence du corps. Il est le premier à se former lorsque nous ne sommes qu'au stade cellulaire.

Mais il ne fait pas la différence entre le danger réel et le danger que nous nous créons en refusant de s'arrêter d'agir, de penser.
Cette fatigue ? ce mal de tête ? Cette anxiété permanente ? cette souffrance de tout instant ?
Ce n'est pas une faiblesse.

C'est un MESSAGE.

Réguler n'est pas forcément tout arrêter, s'asseoir et ne plus agir. On a tendance à diaboliser cet état de survie, étant comme cause unique de dysrégulation. Mais l'inverse est vrai, faire taire ce mode de survie revient à ne plus percevoir de danger, nous rapprochant alors d'une mort prématurée.
Si la nature nous a doté de ce puissant système d'alerte, c'est pour une bonne raison.

Réguler reviendrait alors à savoir naviguer entre ces deux systèmes : survie et repos.

Tel un pendule bloqué à l'une de ses extrémités, l'inertie est semblable à la mort.
Lorsqu'il oscille, il vit et passera toujours par son point d'équilibre.

Quand nous acceptons cette danse, nous pouvons alors agir, pas par peur mais par choix.

Le pendule est comme la vie qui continuera toujours son flot d'existence. Elle ne nous attend pas. Rejeter ou s'accrocher revient à mettre son énergie sur l'incontrôlable.

Réguler, c'est lâcher prise.

Alors maintenant, la question n'est pas "comment je me régule ?"
C'est : "Suis-je prêt(e) à écouter mon corps ?" Parce que la régulation n'est pas une technique. C'est une reddition. Un consentement à ralentir. À être plutôt qu'à faire. À accepter que la vie nous traverse et ne nous attend pas.

Vous n'avez pas besoin d'aller en forêt.
Vous n'avez pas besoin d'une semaine de vacances.
Vous n'avez pas besoin de tout foutre en l'air et de vivre une vie d'ascète.

Imaginez vous vivre votre journée pleinement présent à ce qui se présente à vous. Pour vous. Rien d'autre.

Alors voici ma question : qu'est ce qu'il se passerait si demain vous vous donniez la permission d'arrêter. Sans culpabilité. Sans raison.

Parce que c'est là, dans le silence, que vous entendrez ce que votre corps essaie de vous dire depuis si longtemps.